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Extrait du livre Être sage-femme de Mathieu Azcue (sortie le 7 mai)

L’histoire des sages-femmes rejoint celle de la santé des femmes. Car si les sages-femmes ont été exclues d’un lieu de savoir, l’obstétrique naissante, les femmes vivent elles-aussi une sorte de confiscation de leur capacité propre à accoucher. La médecine expérimentale est vue comme une avancée radicale contre la mortalité des femmes et des enfants. Mais faire spécifiquement du corps des femmes un objet de science a des conséquences culturelles et sociales sans précédent : l’objectivité scientifique va prévaloir sur l’expérience du corps. Par exemple, alors que les femmes pouvaient choisir une position pour mieux supporter le travail et la naissance, les professionnels vont leur imposer la position gynécologique pour l’accouchement. La naissance, événement autrefois privé, devient un événement public, anonyme et morcelé : à la maternité, personne ne connait la future mère, qui ne sera pas suivie par sa sage-femme mais par toute une kyrielle de professionnels : médecin, anesthésiste, pédiatre, sage-femme, infirmières, auxiliaires, kinésithérapeutes et tant d’autres encore.